top of page
Rechercher

Le Château de la Grange Arthuis, histoire et renaissance d’une propriété au cœur de la Grande Histoire

Dernière mise à jour : 21 oct.


Il est des lieux dont la simple silhouette raconte une histoire. Des demeures où le temps s’attarde, où chaque pierre garde le parfum de ceux qui l’ont habitée, aimée, restaurée. Le Château de la Grange Arthuis, lové entre vignes et forêts, appartient à cette lignée rare : celle des maisons qui ne vieillissent pas, mais se transforment, génération après génération.




Aux origines de l'histoire et de la renaissance du Château de la Grange Arthuis : une forteresse de verdure (XVIᵉ – XVIIᵉ siècle)


1574 : un château s’élève dans la lumière retrouvée

Au milieu du XVIᵉ siècle, la Puisaye sort lentement de ses plaies. Les guerres de Cent Ans ont ravagé ses villages, et les forêts de chênes qui entourent Lavau ne sont plus que silence et cendre. C’est dans ce paysage encore blessé qu’apparaît la Grange Arthuis, alors simple terre sans fortification, offerte par François de Bourbon, duc de Saint-Fargeau, à Denis de Butin, seigneur de La Guiche. L’homme est pragmatique, bâtisseur et visionnaire : il veut redonner souffle à ces terres désertées, y ramener les hommes et la vie.

Sous ses ordres s’élève alors un manoir fortifié, modèle d’architecture de transition entre la défense et la demeure : des douves profondes ceinturent le corps principal, un pont-levis défend l’entrée, des tourelles percées de canonnières veillent aux angles, et un rempart de pierre enserre la cour centrale. Autour, la nature reprend racine. Les mares s’emplissent à nouveau, les étangs nourrissent les paysans revenus des provinces voisines.

La Grange Arthuis n’est pas née pour impressionner, mais pour protéger. Ce n’est pas un château d’apparat, c’est un refuge, un bastion de renaissance au cœur d’une époque où chaque pierre posée sur la terre avait valeur d’espérance.



ree

1747 : une demeure devenue maison de grâce

Les siècles passent, et le temps adoucit les contours de la forteresse. Au XVIIIᵉ siècle, un plan daté de 1747 nous révèle une nouvelle figure : le château a troqué sa rudesse médiévale pour la symétrie et la lumière du classicisme français. Ses douves sont encore là, mais elles ne protègent plus : elles ornent. La guerre s’est éloignée, la paix a pris racine, et l’art de vivre s’installe.

La façade ouest, désormais tournée vers un jardin à la française, respire l’équilibre. Trois grandes salles ouvrent sur un parterre géométrique, bordé d’ifs et de topiaires. Au centre, la cage d’escalier monumental symbolise la montée en dignité de la demeure : de simple bastion, elle est devenue maison de campagne raffinée, où l’on reçoit, où l’on contemple.


Plan du Château en 1747
Plan du Château en 1747

La chapelle Saint-Augustin : foi et lumière au cœur de la pierre

Dans une des tours orientales, l’archidiacre d’Auxerre, Augustin Ferréol d’Archambaud, alors propriétaire du domaine, fait ériger une chapelle dédiée à Saint-Augustin. Cette décision, loin d’être anodine, inscrit la Grange Arthuis dans la tradition des demeures spirituelles du XVIIIᵉ siècle : lieux où le sacré et le quotidien se côtoient, où la prière vient équilibrer la puissance.

Les murs sont encore empreints de cette présence. Lorsque la lumière du matin traverse les fenêtres de pierre, elle semble caresser les veines du calcaire comme on bénirait une joue. Dans cette chapelle, les saisons passent, et les échos d’autrefois demeurent : les messes murmurées, le cliquetis des chapelets, les vœux chuchotés avant les semailles.

Le domaine, à cette époque, ne se contente plus de vivre : il commence à raconter. Il devient le miroir d’un art de vivre à la française, entre discipline et beauté, entre foi et nature — une demeure qui respire la sérénité de ceux qui croient en l’avenir.



Les siècles éclairés : du manoir à la demeure de charme (XVIIIᵉ siècle)


L’héritage Stample : entre raison et raffinement

À la mort de l’archidiacre Augustin Ferréol d’Archambaud, le domaine revient à son neveu, Augustin Claude François Stample, avocat au Parlement. L’homme est un lettré, attaché à l’ordre, au calme et à la beauté de la nature cultivée. Sous son impulsion, le château quitte l’austérité pour s’habiller de nuances. Les jardins s’étendent, les étangs s’alignent, les bois s’ouvrent sur des clairières. On parle déjà, dans les registres, de la “Grande Arthuis”, cette vaste propriété agricole, forestière et seigneuriale où l’on cultive autant la terre que l’esprit.

Les Stample sont des gens de raison, mais aussi de cœur. Ils conçoivent le domaine comme un microcosme harmonieux, un lieu où chaque métier trouve sa place : fermiers, jardiniers, veneurs, charpentiers, tous œuvrent à la prospérité commune. La Grange Arthuis devient alors un modèle d’exploitation éclairée, à la fois source de richesse et d’élégance. C’est la première métamorphose du lieu : d’une forteresse, il devient un corps vivant, où la pierre, l’eau et le bois travaillent de concert.


Avancée en brique construite par le Marquis de Lestrade
Avancée en brique construite par le Marquis de Lestrade

Les racines d’une transmission : la rencontre avec les Lestrade

En 1821, au crépuscule du siècle des Lumières, le dernier héritier Stample meurt sans enfant. Dans son testament, il lègue le domaine à sa nièce, Sylvie Augustine Claire Tourniole de Larade, une femme instruite et passionnée, mariée à Odon de Lestrade, comte et ancien officier. Par cette union, la Grange Arthuis entre dans une nouvelle dynastie — celle des Lestrade, qui feront de cette propriété un joyau d’art et de chasse.

Dès leur arrivée, les époux Lestrade entreprennent de rénover la demeure et d’étendre les terres. Ils achètent prairies, forêts et métairies voisines, reconstituant patiemment un territoire d’un seul tenant, allant jusqu’à Saint-Martin-des-Champs et Batilly. À la fin de leurs acquisitions, le domaine couvre plus de 1 200 hectares, un monde à lui seul : bois, manœuvreries, vergers, étangs, terres labourées, clos et chemins de chasse. La Grange Arthuis devient un royaume campagnard, un théâtre de nature ordonné par la main humaine.



Blason de la famille Lestrade
Blason de la famille Lestrade

Une demeure en mouvement : élégance et équilibre

Le cadastre de 1834 témoigne d’une demeure repensée dans l’esprit néoclassique. L’enceinte défensive a disparu, remplacée par deux pavillons symétriques encadrant la cour, et des ailes latérales prolongeant le logis central. Les douves se sont muées en miroirs d’eau, les remparts en terrasses, les fossés en allées d’ifs. Le château respire désormais, ouvert sur le paysage, comme un palais pastoral.

Autour de la maison, on cultive le chanvre pour tisser des vêtements, on entretient des jardins potagers, des serres, des vergers, une filière de vannerie et des ateliers domestiques où travaillent les gens du domaine. On y sent le parfum du foin et de la cire, le cuir des harnais, la fraîcheur des caves, le craquement du bois sous les pas : tout est à sa place, tout vit en cadence.

Sous les Lestrade, la Grange Arthuis devient un lieu de vie complet, à la fois ferme, maison noble, et laboratoire d’une ruralité raffinée. Le siècle romantique s’ouvre, et dans ce coin de Bourgogne, la terre se fait poésie.



L’âge d’or du XIXᵉ siècle : blason, faste et vénerie


Un château qui se redresse dans la lumière

Sous la main du marquis Georges de Lestrade, la Grange Arthuis change de visage. Les façades s’animent, les fenêtres s’élargissent, la pierre s’éclaircit. Au nord, une entrée monumentale en brique s’avance comme une déclaration : désormais, le château s’ouvre au monde. On pénètre dans la demeure par un vaste hall, orné d’un escalier majestueux menant aux salons d’apparat.

Mais ce n’est pas seulement une question d’architecture : c’est une question de statut. En affichant son blason sur le fronton — écu d’or barré d’une fasce à trois étoiles, encadré d’hermines et de lions, surmonté d’une couronne de marquis — Georges de Lestrade inscrit son nom dans la pierre, comme jadis on grava celui des ducs sur les pierres de Dijon. Les lions pour le courage, les hermines pour la pureté, les étoiles pour la destinée : tout un langage symbolique que seul le regard des initiés sait encore lire.

Dans les salons, on cause littérature et vénerie. On lit Le Gaulois ou La Vie à la Campagne. On parle de chevaux, de musique et de politique. La Grange Arthuis devient un refuge élégant, un salon à ciel ouvert où la noblesse provinciale se retrouve à la saison des chasses.


La chapelle du marquis : prière et silence

Au nord-est du château, le marquis fait bâtir une chapelle privée, simple, sobre, tournée vers le ciel. On y entre par une porte basse, et dès qu’on y pénètre, l’air se fait plus frais, plus doux. Les vitraux tamisent la lumière comme un souffle, et sous la voûte, le silence pèse d’une gravité bienveillante.

Ce n’est pas une chapelle d’apparat, mais une chapelle d’âme — lieu de recueillement avant les grandes chasses, de baptêmes familiaux et de messes funèbres pour les chiens fidèles tombés à la poursuite du cerf. On y prie avant l’aube, en bottes encore couvertes de rosée, les cors suspendus au bras, les chevaux sellés dans la cour. Tout ici respire la piété discrète de ceux qui savent que la forêt est un sanctuaire, et que la chasse, au fond, n’est qu’une autre manière de célébrer la vie.



La “folie des grandes chasses” : l’équipage de la Grange Arthuis

En 1875, le marquis fonde son équipage de chasse à courre. C’est le début d’une légende : dans les clairières de Lavau et les futaies profondes de Puisaye, résonnent désormais les fanfares de trompes et le claquement des sabots. La meute du marquis — une cinquantaine de chiens de Saintonge et d’Anglo-Poitevins — est réputée pour sa tenue et son obéissance. Les piqueurs portent la livrée rouge et or, les boutons frappés aux armes des Lestrade.

Chaque saison, on prend une trentaine de cerfs et une dizaine de sangliers. Les jours de chasse sont des cérémonies : au lever du jour, on bénit la meute ; à midi, les dames servent le vin chaud sous les ormes ; le soir, la curée réunit valets, veneurs et villageois dans une ferveur presque liturgique. L’air embaume le cuir, la sueur, la forêt, la vie.

Le marquis préside à tout cela avec une prestance tranquille, un sourire à demi. On le dit courtois, savant, profondément passionné par la nature et par la science des chiens. Sa devise, « Puisaye pique de près », claque dans les bois comme un écho à son tempérament : précis, ardent, fidèle à la voie juste.



Les “Conseils d’un vieux veneur” : le testament du marquis

Lorsqu’en 1911, Georges de Lestrade publie son ouvrage Conseils d’un vieux veneur, il n’écrit pas seulement pour les chasseurs. Il y parle de la patience, du respect, de la connaissance des bêtes et des saisons. Son ton est celui d’un homme qui a compris que la vénerie n’est pas un jeu, mais un art — celui de l’écoute, de la retenue, de la transmission. L’ouvrage deviendra, bien plus tard, une référence pour les veneurs français.

On y lit cette phrase, souvent citée dans les cercles cynégétiques :

“Chasser, c’est marcher à la rencontre du mystère.”

Tout est dit.


Dans cette phrase se condense la philosophie du lieu : la Grange Arthuis n’est pas qu’un domaine, c’est un territoire d’âme, où la nature devient enseignement, et la chasse, un dialogue avec l’invisible.



Le déclin des fastes

Mais toute lumière porte son ombre. À mesure que les fêtes se succèdent, les dettes s’alourdissent. Les chasses, les bals, les banquets, la fanfare, les chevaux — tout cela coûte cher, et la fortune des Lestrade s’érode.

En 1909, contraints par les créanciers, ils se résolvent à vendre : le château, ses dépendances, ses bois et ses étangs passent aux mains d’un Anglais, Adam Morton. Puis, en 1917, l’industriel Henri Foucault rachète le domaine, apure les dettes et lui rend son éclat. Les grandes chasses se taisent, la fanfare se meurt, mais le souffle du lieu demeure.



De la gloire à la modernité : ventes, vergers et renouveau (XXᵉ siècle)


1909 – 1917 : la fin d’un monde

Le siècle nouveau s’ouvre dans un parfum d’inquiétude. Les grandes chasses se sont tues, les salons se sont vidés. Le marquis de Lestrade, ruiné par les dettes et les folies d’entretien, doit céder ce qu’il a de plus cher : le Château de la Grange Arthuis. En 1909, la propriété — ses 1 064 hectares de terres, forêts et étangs — est vendue à un Anglais, Adam Morton.

C’est la fin d’un monde. Les trompes ne résonnent plus dans la forêt, les chevaux ne piaffent plus dans la cour. Le marquis quitte les lieux, laissant derrière lui le souvenir de fêtes brillantes et la mélancolie d’un domaine qui a trop aimé la beauté.

Adam Morton, homme discret et méthodique, entreprend peu de travaux : il veille à solder les dettes, à apaiser les créanciers, à redonner souffle à ce géant endormi. Mais la guerre approche, et la France s’assombrit. Les échos du front, l’inquiétude, la peur : tout pousse le propriétaire anglais à s’éloigner.

Le 17 novembre 1917, il vend la Grange Arthuis à Henri Foucault, industriel éclairé et visionnaire, convaincu que la modernité peut aussi servir la mémoire.


Henri Foucault : restaurer sans effacer

Henri Foucault n’est pas un noble, mais il a pour la pierre et la terre le respect des bâtisseurs. À peine installé, il s’emploie à rétablir la dignité du domaine :les dettes sont remboursées, les bois replantés, les toitures consolidées. Il rachète des terres jadis dispersées, rouvre les chemins, nettoie les étangs.

Sous sa main, le château retrouve son rythme — plus silencieux, plus modeste, mais sincère. La demeure cesse d’être un emblème social pour redevenir un centre vivant, une maison habitée, ancrée dans le siècle. On raconte qu’il fit même installer un terrain de tennis au pied des tours : symbole d’une époque où le loisir se fait moderne, et où le patrimoine s’apprivoise à la lumière des jours nouveaux.

Henri Foucault restera longtemps le gardien de cet équilibre fragile : celui d’un lieu qui ne veut pas mourir de son passé, mais vivre de son héritage.


Les années 1960 – 1980 : la révolution des vergers

Les décennies passent, et la Grange Arthuis change de mains. Le vent du progrès souffle sur la campagne française : les tracteurs remplacent les chevaux, les domaines s’adaptent à la logique du rendement. Sous la direction de M. Fleck, puis de M. Richet, la propriété entre dans une nouvelle ère — celle des vergers.

Les vastes prairies se couvrent de pommiers, cerisiers et pruniers, rangés comme des soldats en pleine lumière. Une station fruitière est construite, avec sept chambres froides et des lignes de tri flambant neuves. Chaque automne, le château devient une ruche :les ouvriers trient, calibrent, emballent près de 1 200 tonnes de pommes, que l’on expédie dans toute la région. Les parfums de cire et de fruit mûr emplissent les dépendances. Les cris des enfants des employés résonnent dans la cour — des sons nouveaux, simples, humains.

Le château, témoin de la lente modernisation du pays, devient le symbole d’une ruralité industrieuse, à la fois moderne et fidèle à la terre. Sous ses toits de tuiles anciennes, l’Histoire continue de respirer, mais à un rythme plus modeste, plus vrai.


1984 : François Reynaud, le visionnaire

Puis, un jour, les portes s’ouvrent à nouveau. Un homme s’avance, le regard vif, la démarche décidée : François Reynaud. Nous sommes en 1984, et le château s’apprête à connaître sa renaissance. Entre ses mains, la Grange Arthuis va redevenir un territoire d’ambition et de vie.



La renaissance selon François Reynaud (1984–2000)


Le retour du souffle

Lorsque François Reynaud découvre la Grange Arthuis, le temps semble s’être arrêté. Les murs sont lézardés, les douves à moitié comblées, les fenêtres closes depuis trop longtemps. Mais l’homme, entrepreneur et amoureux de la terre, y voit autre chose : une promesse, un espace où tout peut renaître. Ancien PDG du groupe Teisseire, il a passé sa vie à transformer la matière première en émotion. Dans ce château oublié, il devine un même destin : celui d’un lieu capable de redonner saveur à la vie.

Dès 1984, les engins se mettent en marche, la poussière s’élève, les marteaux résonnent. François Reynaud ne restaure pas seulement des murs : il réveille un esprit. Il marche chaque jour entre les pierres, observe la lumière glisser sur les façades, imagine déjà les verres de vin tintant sous les voûtes restaurées. “Ce lieu n’est pas un souvenir, confiera-t-il un jour, c’est une respiration.


Des fruits rouges et des rêves de vigne

Son premier geste est pragmatique, mais inspiré :il remplace les vergers vieillissants par des fruits rouges — cassis, groseilles, framboises — destinés à alimenter son entreprise Teisseire. Le château retrouve ainsi une activité économique tout en renouant avec la terre nourricière. Mais au-delà de la culture, François Reynaud veut redonner une âme agricole et viticole à la propriété.

Dans la Nièvre voisine, il plante des vignes de Sauvignon, de Pinot et de Gamay, faisant ainsi renaître le vin de la Grange Arthuis, disparu depuis près d’un siècle. Ce geste symbolique marque le retour du château dans le monde du vivant et du partage. L’arôme du raisin mûr se mêle à celui du bois des chais, et les collines alentour deviennent à nouveau des terres de promesse.



Château de la Grange Arthuis en 1996
Château de la Grange Arthuis en 1996

Les grandes restaurations : la demeure retrouve sa voix

Entre 1992 et 1996, un vaste chantier de restauration est lancé : les toitures sont reprises, les huisseries changées, les façades ravalées, les terrasses repavées. Chaque pierre est replacée avec soin, chaque menuiserie restaurée dans le respect de la matière d’origine. Sous les pavés de la cour, on découvre même les fondations d’anciens bâtiments disparus, comme un palimpseste de l’histoire.

Le château, lentement, retrouve sa dignité. Puis viennent les chambres d’hôtes (1996), la création du chai et de la salle de dégustation (1998–2000),comme une évidence : la Grange Arthuis n’est pas faite pour dormir, mais pour accueillir.

Les habitants du village s’en souviennent encore : les soirs d’été, les fenêtres du château étaient à nouveau illuminées. La musique résonnait dans la cour, les rires montaient du chai, et les senteurs de bois ciré et de vin neuf flottaient dans l’air. Le domaine vivait. Et sous la main de François Reynaud, il redevenait ce qu’il avait toujours été : un lieu de rencontre entre la nature, la culture et l’homme.



ree

Les forêts retrouvées : le retour du paysage

Fidèle à la vocation originelle du lieu, François Reynaud reconstitue un domaine forestier de 150 hectares autour du château. On replante des chênes, des hêtres, des frênes, comme pour prolonger la mémoire des bois de la Puisaye. Là encore, la symbolique est forte : le bois, jadis utilisé pour les fûts de chêne du vin, retrouve son rôle nourricier et protecteur.

Ces forêts, aujourd’hui encore, forment la respiration verte du domaine. Elles rappellent la majesté de la forêt d’Orléans, autrefois foulée par les chiens du marquis de Lestrade, et offrent un décor apaisant où l’on sent battre le cœur de la terre.

Sous François Reynaud, la Grange Arthuis redevient un territoire complet, où les arbres, les fruits et le vin se répondent en harmonie. C’est la période du renouveau et de l’équilibre, celle d’un homme qui a su marier la rigueur de l’industrie et la sensibilité du vigneron.


ree

Après Reynaud : le silence et la friche (2000–2019)


Une éclipse dans la mémoire du lieu

Lorsque François Reynaud s’éteint, la Grange Arthuis perd plus qu’un propriétaire : elle perd un souffle. Le domaine, déjà si vaste, entre alors dans une période d’incertitude. Plusieurs mains s’y succèdent, sans que la vision d’ensemble ne perdure. Les toitures vieillissent, la nature reprend ses droits, les allées se couvrent d’herbes folles.

Puis vient un homme du Nord, un propriétaire danois au projet ambitieux, qui voit dans la Grange Arthuis une opportunité d’investissement et de prestige. Les habitants se souviennent encore de son arrivée — des camions, des engins, de quelques travaux entamés avec enthousiasme. Mais le rêve tourne court.

Loin de ses racines et de la compréhension du terroir, il ne parvient pas à habiter le lieu. Les difficultés s’accumulent, les dettes reviennent, et la demeure s’éteint une fois de plus. Les volets se ferment, les fenêtres s’effritent, la cour se vide.



ree

Le château abandonné

Les années passent, et la Grange Arthuis devient une ombre de château, un souvenir pour les habitants alentour. On raconte que les herbes atteignaient les fenêtres du rez-de-chaussée, que les pigeons nichaient sous les voûtes, que les douves s’étaient changées en marécages.

Les plus anciens du village descendaient parfois jusqu’aux grilles, regardant, impuissants, la lente déchéance d’un lieu qu’ils avaient vu renaître trente ans plus tôt. « On l’a laissé mourir une seconde fois », confia un jour un habitant de Lavau,« et pourtant, on savait bien qu’un jour quelqu’un viendrait le relever. »

Ce sommeil douloureux durera près de vingt ans. Mais comme souvent à la Grange Arthuis, les fins ne sont que des préludes. Car dans le silence de la friche, sous les herbes et la mousse, la terre préparait déjà sa prochaine aurore.




Le renouveau Charton : sauver la beauté, restaurer la vie (depuis 2019)


Revenir à la terre, revenir à soi

L’histoire de la Grange Arthuis aurait pu s’arrêter là, dans le silence d’une allée envahie d’herbes folles, entre des pierres oubliées et des douves noyées de mousse. Mais en 2019, un couple franchit les grilles rouillées. Ils s’appellent Pascal et Évelyne Charton, et dans leur regard, il y a cette flamme rare — celle des gens qui voient la vie là où d’autres ne voient plus que ruines.

Le château est à l’abandon. Les toitures fuient, la chapelle se fissure, les murs s’effritent. Pour atteindre la cour d’honneur, Pascal Charton doit défricher lui-même le chemin : les ronces avaient tout envahi, comme si la nature avait voulu reprendre son royaume. C’est là, au milieu du silence et du vent, que naît leur conviction :

“Nous ne pouvions pas le laisser disparaître.”

Sauver la Grange Arthuis ne sera pas un investissement, mais un acte d’amour.


Un geste simple et immense à la fois : sauver un joyau du patrimoine, redonner un cœur battant à un lieu que le temps menaçait d’effacer.


Deux vies de travail, un dernier grand œuvre

Toute leur vie, Pascal et Évelyne Charton ont travaillé durement. Ils ont connu les affaires, les chiffres, les marchés, les contrats — la rigueur du monde économique, mais aussi la satisfaction de construire. Et au terme de ce parcours, ils ont choisi de revenir à leurs premières racines, celles qui sentent la terre, le bois et le vent.

Pascal Charton est fils d’agriculteur, agriculteur lui-même dans l’'être et dans l'âme. Sous ses mains, le travail a toujours été une prière : redresser, planter, faire pousser, récolter. Ce retour à la terre n’est pas un caprice tardif, c’est l’accomplissement d’une vie entière. Quant à Évelyne, elle apporte la douceur, le regard attentif, l’équilibre. Elle veille aux intérieurs, aux jardins, aux chambres, aux lieux d’accueil. Elle met de la beauté dans le quotidien et de la lumière dans les pierres.

Ensemble, ils ont fait de la Grange Arthuis leur œuvre ultime, le fruit mûr de toutes leurs années d’efforts. Non pas une retraite, mais une renaissance.


Restaurer, réparer, rembourser : rebâtir la dignité

Dès leur arrivée, tout est à refaire. Le domaine, laissé en friche par le précédent propriétaire, cumule des années de dettes et de désolation. Beaucoup auraient renoncé. Eux, non.

Ils remboursent intégralement les créances héritées, pour redonner au domaine une base saine, puis engagent d’immenses travaux de restauration :

  • La chapelle retrouve ses couleurs, son autel, ses vitraux.

  • Les logis, les hébergements, les espaces de réception sont entièrement rénovés.

  • Les toitures sont refaites, les murs consolidés, les parquets restaurés.

  • Les vignes et les jardins sont replantés, les bois réhabilités.

  • Le chai et les espaces d’accueil retrouvent leur éclat d’autrefois.

Chaque pierre, chaque poutre, chaque porte restaurée l’est avec respect — non pas pour effacer le passé, mais pour le prolonger. Les artisans travaillent comme des orfèvres, la poussière se mêle à la prière, et peu à peu, le château retrouve sa voix.

On raconte qu’un soir, alors que le soleil couchant enveloppait la façade d’une lumière dorée, Pascal Charton s’est arrêté un instant dans la cour. Il a regardé la demeure, a souri, et a simplement dit :

“Ça y est, il respire à nouveau.”

Le vin comme héritage, la terre comme promesse

Mais la Grange Arthuis ne se limite pas à ses murs : elle vit par ce qu’elle donne. Les Charton ont voulu redonner au vin sa place centrale, en développant des cuvées précises, élégantes, à la hauteur des terroirs qui entourent la propriété. Sous leur impulsion, les vignes sont conduites avec exigence, les rendements maîtrisés, les sols respectés. Les raisins sont vinifiés dans l’esprit du lieu : sans artifice, avec sincérité.

Le résultat est là : des vins d’excellence, droits, équilibrés, empreints d’élégance et de profondeur. Des vins à l’image du domaine et de ceux qui le font revivre : fiers sans arrogance, puissants sans excès, nobles sans emphase.

Dans le chai restauré, les fûts alignés renvoient la lumière comme un miroir. Les visiteurs viennent y déguster les cuvées, découvrir l’histoire du lieu, sentir l’écho de la terre dans chaque verre. Et dans ce silence feutré, entre les barriques, on perçoit quelque chose d’essentiel : la continuité.


Un château redevenu vivant

Sous la direction de Pascal et Évelyne Charton, la Grange Arthuis est redevenue un domaine cohérent :

  • Un lieu de production viticole d’excellence.

  • Un site d’accueil pour les réceptions, mariages et séminaires.

  • Un havre d’hospitalité au cœur de la nature, où le patrimoine dialogue avec la modernité.

Chaque espace a retrouvé sa fonction :le chai pour le vin, les chambres pour le repos, les forêts pour la marche et la contemplation, la chapelle pour le recueillement.

Le château n’est plus un vestige, mais une demeure de vie, ouverte et rayonnante. Et ceux qui le visitent ressentent cette présence invisible, cette vibration qui dit :

“Quelqu’un a pris soin de moi.”

Sauver un joyau, conclure une vie

Pour Pascal et Évelyne Charton, la Grange Arthuis n’est pas un aboutissement financier, ni même une aventure immobilière. C’est l’œuvre d’une vie, au sens le plus noble du terme. Sauver ce château, le restaurer, le rendre à la lumière — c’est leur manière d’écrire une dernière page, faite d’humilité et d’espérance.

Fils d’agriculteur, Pascal Charton est revenu à la terre comme on revient à la source : pour comprendre, transmettre, et remercier. Évelyne, discrète et forte, veille à ce que chaque détail reflète la douceur d’une maison habitée. Ensemble, ils ont offert à la Grange Arthuis ce que peu de lieux reçoivent : une seconde naissance, faite d’amour et de courage.

Et aujourd’hui, lorsque le soleil se couche derrière les chênes du parc, et que la lumière dorée vient caresser les pierres rénovées, on pourrait presque entendre, dans le murmure des feuilles, le château lui-même murmurer :

“Merci.”

Le temps, la terre et la lumière

Il y a dans certaines demeures une mémoire plus vaste que celle des hommes. La Grange Arthuis appartient à cette famille-là : celle des lieux qui traversent les siècles sans jamais rompre le fil. De la forteresse de 1574 aux vergers du XXᵉ siècle, des fastes de la vénerie à la renaissance viticole, elle n’a cessé de se transformer, sans jamais perdre son âme.

Chaque époque a laissé sa trace :le marquis de Lestrade y grava l’écho des fanfares, François Reynaud y insuffla le souffle du renouveau, et Pascal et Évelyne Charton y ont redonné la lumière — celle des mains qui relèvent, qui réparent, qui aiment.

Le château est désormais vivant. Les pierres parlent, la vigne s’étend, la forêt respire. Les visiteurs viennent s’y recueillir, non comme dans un musée, mais dans une maison qui bat encore. Car ici, le patrimoine n’est pas figé : il respire, il accueille, il continue d’écrire l’histoire des hommes et de la terre.

Et peut-être est-ce cela, la véritable grandeur : non pas durer, mais renaître. Comme la vigne après l’hiver, comme la flamme qui vacille et repart, comme la Grange Arthuis, à jamais fidèle à sa devise invisible —celle du courage, de la transmission et de la lumière retrouvée.

 
 
Verre de vin rouge

Vins

NOS VINS
Découvrez les cuvées des vignes du Château.

tampon.png
BLASON---creme.png

CHÂTEAU DE LA GRANGE ARTHUIS

La Grange Arthuis, Route de Bléneau, 89170 Lavau

L'ABUS D'ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, CONSOMMEZ AVEC MODÉRATION

POLITIQUE DE CONFIDENTIALITE ET COOKIES - MENTIONS LEGALES

Réalisation : Vitivalor Conseils & Services 2025 

bande chene vert clair.png
bottom of page